Comment le maïs Zea mays arrive-t-il à fournir son propre azote ?
On a récemment découvert une ancienne variété de maïs (Zea mays) qui obtient le gros de son azote de bactéries se nourrissant du mucilage que produisent ses racines.
L'importance de l'azote
L’azote (N) est abondant dans l’atmosphère et les plantes en ont grand besoin pour se développer, mais elles n’ont pas la capacité de l’absorber directement de l’air.
Engrais riche en azote
Les agriculteurs dépensent alors des milliards de dollars et d’euros chaque année pour des engrais riches en azote que les plantes peuvent absorber par leurs racines, et à la fois la production de ces engrais et leur utilisation causent de nombreux problèmes environnementaux.
Plantes qui fabriquent de l'azote
Et c’est vrai que certaines plantes réussissent à récolter l’azote présent dans l’atmosphère… avec un peu d’aide bactérienne.
Les légumineuses, par exemple, notamment deux plantes alimentaires bien connues, le pois et le haricot, sont réputées pour leur capacité à former des associations symbiotiques avec les bactéries Rhizobium et Bradyrhizobium fixatrices d’azote qui vivent dans des nodules trouvés sur leurs racines. Les légumineuses donnent un peu de sucre aux bactéries et, en retour, les bactéries leur donnent de l’azote. Tout le monde y gagne! Quelques autres plantes d’autres familles, comme l’argousier (Hippophae rhamnoides), ont également développé une symbiose avec des bactéries fixatrices d’azote, mais la grande majorité des végétaux doivent tirer leur azote de la décomposition de produits végétaux et animaux… ou de l’engrais!
Le maïs ‘Sierra Mixe’
Cependant, on a découvert une souche de maïs qui entretient également une relation symbiotique avec les bactéries fixatrices d’azote.
Ce maïs de grande taille (4,5 à 6 m de hauteur, soit deux fois la hauteur des variétés de maïs modernes) est une lignée ancienne traditionnellement cultivée dans la sierra Mixe de l’État d’Oaxaca (sud du Mexique). On a donc nommé la variété ‘Sierra Mixe’. Elle est cultivée depuis des centaines d’années, peut-être des milliers, par les tribus de la région. La sierra Mixe est d’ailleurs l’une des régions où le maïs a été développé à partir de la graminée sauvage téosinte il y a environ 7 000 ans.
Le maïs ‘Sierra Mixe’ est adapté aux sols pauvres où il se développe sans engrais. Et il peut réussir cet exploit grâce à la fixation d’azote.
Il a fallu près de 30 ans d’études pour comprendre ce qui se passait, depuis la découverte de la race locale par Howard-Yana Shapiro (maintenant DG de Mars inc., le commanditaire principal de l’étude) dans les années 1980 jusqu’aux études de l’équipe actuelle, avec Alan B. Bennett à leur barre, à l’Université de Californie à Davis.
Ce maïs produit de nombreuses racines aériennes rose et vert à partir de nœuds trouvés sur ses tiges et celles-ci sont recouvertes d’une sorte de mucilage gélatineux transparent. Il s’avère que des bactéries fixant l’azote se développent dans le mucilage. À partir de ce milieu, elles extraient l’azote de l’air, puis le partagent avec le maïs. Jusqu’à 29% à 82% de l’azote que le maïs utilise vient des bactéries.
Maintenant, la question est: cette capacité peut-elle être transférée par hybridation au maïs standard? Si tel est le cas, est-ce que la capacité de fixation de l’azote sera adaptée à de multiples climats? (Le maïs est cultivé dans de nombreux environnements dans le monde entier.) Et cette symbiose existe-t-elle dans d’autres cultures céréalières ou est-ce qu’on peut l’y introduire? Si tel est le cas, son effet peut-il être intensifié par une sélection rigoureuse?
Le maïs est déjà la céréale dont la production annuelle est la plus importante au monde (1 099 millions de tonnes), suivi du blé (734 millions de tonnes) et du riz (496 millions de tonnes). Si ces trois céréales produisaient la majeure partie de leur azote par symbiose, cela allégerait certainement la charge sur l’environnement!